En 1427, Masaccio intègre pour la première fois les principes de la perspective à l’échelle monumentale dans une œuvre artistique.
En 1910, Kandinsky abandonne le monde de la figuration dans son aquarelle « Sans Titre » et réalise ainsi la première œuvre abstraite de l’histoire. Plus tard, en 1943, « Mural » de Pollock, impressionne par sa taille et sa célébration de l’abstraction gestuelle de l’Action Painting.
Ce ne sont là que quelques-unes des nombreuses révolutions qui ponctuent l’histoire de l’art. Autant d’évolutions qui ont transformé les sujets, les techniques, les modes de représentation et la nature de l’œuvre.
En 2021, c’est la dématérialisation qui devient Art. Bienvenue dans l’âge du crypto-art.
Un monde où les œuvres d’art ne sont réalisées que sur des supports numériques, et dont la collection, l’exposition et la consultation sont exclusives à l’espace digital. Un concept qui ne ferait de loin pas autant de vagues si ce n’était pour l’arrivée d’une nouvelle technologie, révolutionnaire elle aussi : les NFT ou non-fungible tokens, des jetons cryptographiques pouvant être créés pour représenter n’importe quel objet sur la Toile.
En se basant sur la technologie de la blockchain, ces jetons sont uniques et non reproductibles, ce qui permet de garantir l’exclusivité et la rareté d’un objet là où le copier-coller est la règle. En garantissant l’authenticité et la traçabilité d’une œuvre, ils permettent ainsi la création d’un véritable marché, dont les règles restent similaires à celles du marché de l’art traditionnel.
Un marché qui était, il y a encore peu de temps, une niche, et qui voit depuis quelques mois sa cote exploser, au même titre que les valorisations de ces œuvres pourtant physiquement inexistantes. La vente en début d’année de l’œuvre « Everyday : the first 5.000 Days » par l’artiste britannique Beepl, pour $69.3M en est l’exemple même. Cette vente propulse Beepl au rang des artistes vivants les plus chers de la planète et renforce le potentiel mercantile de cette forme d’art.
Une évolution de plus pour un marché qui se digitalise de plus en plus. En effet, si les ventes d’œuvres ont chuté de 22% par rapport à 2019, la part de la vente en ligne a, elle, explosé. Cette dernière représente désormais 25% du volume global de ventes pour une valeur qui a doublé par rapport. Pour la première fois, la part de l’e-commerce dans le marché de l’art aura dépassé celle du commerce de détail. Un mouvement largement accéléré par la pandémie, mais dont le développement ne semble pas devoir porter préjudice aux acteurs traditionnels du secteur.
Mais si la digitalisation du marché de l’art apparaît comme une évidence aujourd’hui, celle de l’œuvre elle-même interroge. Pure frénésie spéculative pour certains, transformation profonde pour d’autres, le crypto-art divise autant qu’il intrigue. Les possibilités qu’il offre, d’un accès plus démocratique aux œuvres et à la scène artistique, sont réelles. Et cette tendance pourrait bien s’inscrire dans une évolution plus générale de notre société où l’espace de vie numérique devient tout aussi – sinon plus – important que le physique. Reste à voir si après une année entière passée devant nos écrans, l’envie du réel ne reprendra pas finalement le dessus…
Chiffre lié : 12,4 milliards, la valeur représentée par la vente d’art en ligne en 2020.