« Les illusions s’évanouissent et les spectres vides disparaissent » (John Milton – 1667).
Près de 4 siècles plus tard, ce vers s’applique avec justesse à un sujet beaucoup moins poétique : la politique de l’Union européenne à l’égard des sociétés-écrans.
Le Parlement européen a en effet approuvé, en janvier, une version remaniée de la directive ATAD 3 (Anti-Tax Avoidance Directive 3), qui élargit son champ d’application à un plus grand nombre d’entités. Avec une entrée en vigueur prévue pour le 1er janvier 2024, les organisations à fiscalité transnationale devront vérifier que les entités de type holding, enregistrées à l’étranger, respectent certaines exigences de substance.
En synthèse, ce texte, qui doit encore être validé par le Conseil de l’UE, définit les structures concernées par le cumul de trois critères : plus de 75% des revenus sont passifs (dividendes, intérêts, plus-values, etc.) ; plus de 60% des revenus proviennent d’une juridiction différente de la juridiction d’enregistrement ; l’administration, la gestion et le processus de décision sont externalisés à une tierce personne.
Toutefois, certaines entreprises cotées, financières et de gestion seront exclues du champ d’application…
Les structures répondant à ces critères devront renforcer leur substance effective si elles veulent éviter la qualification de sociétés-écrans. Par exemple, locaux en propre (autres qu’une boite aux lettres), au moins un dirigeant qualifié résidant dans l’état où se situe la société (pas d’avocat ou de fiduciaire).
Les sanctions s’élèveraient à un minimum de 2% du chiffre d’affaires, avec une amende supplémentaire de 4% en cas de fausse déclaration, ainsi que la non-délivrance d’un certificat de résidence fiscale.
Ces mesures d’harmonisation, de renforcement de la transparence et de l’équité fiscale, visent à rendre l’optimisation fiscale agressive plus difficile au sein de l’Union européenne. Les holdings et sociétés suisses ne sont donc pas couvertes par la directive, mais pourront toujours être visées par les lois anti-abus des pays européens.
Nombre de grands patrimoines privés s’organisent autour de structures transnationales pour servir des stratégies internationales. Nul doute cependant qu’un devoir de vigilance redoublée devra s’appliquer. L’accompagnement par un family office et des conseils avisés ne prend que davantage de pertinence dans un tel contexte !