Le bon, la brute… et le truand
Dans le private equity, le marché secondaire permet d’acheter, ou de vendre, des parts de fonds déjà existants, mais aussi des actifs ou participations spécifiques au sein de portefeuilles existants. Concrètement, il offre une porte de sortie pour certains, une entrée rapide pour d’autres, avec plus de visibilité et un horizon raccourci.
Longtemps réservé aux initiés, le secondaire s’impose désormais comme un pilier de liquidité. En 2024, il a franchi la barre des 160 milliards de dollars de transactions, et devrait dépasser les 200 milliards en 2025. Modeste face aux 10 000 milliards du marché primaire, il séduit un public élargi à la recherche de flexibilité et de transparence : fonds de pension, assureurs, family offices… voire des investisseurs particuliers, via des offres plus « retail » !
GP-led, la carte “continuation”
Quand un fonds arrive en fin de vie mais abrite des actifs prometteurs, ou bien quand le GP (« General Partner » ou gérant) estime qu’un actif nécessiterait plus de capital et déciderait de le gérer séparément, il peut sortir la carte “continuation fund”. Objectif : prolonger la création de valeur, tout en laissant aux investisseurs le choix de rester à bord ou d’encaisser leur gain. Deux formats dominent :
- Le « Single-asset continuation fund » : un actif phare est repris seul afin de bénéficier de son potentiel de croissance.
- Le « Multi-asset continuation fund » : plusieurs participations sont regroupées pour une gestion optimisée, avec un objectif identique.
L’intérêt est triple :
- Plus de contrôle car le GP garde la main sur des actifs déjà connus et gérés par une équipe expérimentée.
- Plus de flexibilité et la génération de liquidité avec une sortie partielle ou totale pour les investisseurs.
- Plus d’efficacité en raison d’une fluidité souvent meilleure que lors d’une cession classique.
Le secondaire parait donc paré de beaucoup de vertus dans l’univers de l’investissement illiquide mais, comme toujours, la réalité est plus nuancée !
Le bon : ce qui séduit
- Une performance solide. Sur 20 ans, le secondaire surpasse les autres segments du private equity en rendement ajusté au risque.
- De la transparence avec des actifs identifiés et des valorisations moins spéculatives.
- Un alignement d’intérêt car le GP va souvent réinvestir la majorité voire la totalité du « carry » embarqué dans le ou les deals en question.
- Des avantages structurels, avec une courbe en J largement évitée, un horizon d’investissement raccourci et une décote à l’entrée.
La brute : zones grises à surveiller
- Les conflits d’intérêts. Dans les GP-led, le GP fixe le prix des actifs – un risque de devenir juge et partie.
- Une complexité juridique et fiscale puisque chaque opération nécessite des négociations et de nombreuses validations réglementaires.
Le truand : les pièges (potentiels)
- La survalorisation. Dans un marché en surchauffe, certains actifs prolongés peuvent l’être à des conditions peu favorables.
Le marché secondaire n’est donc plus une simple porte de sortie. Il est devenu un levier stratégique pour optimiser la liquidité, ajuster les portefeuilles et renforcer leur résilience. Comme dans tout bon thriller, il faut savoir distinguer les héros, les durs à cuire… et les bandits.
En résumé, c’est un peu le rayon “soldes” du private equity : de belles opportunités, mais il faut lire les étiquettes et garder son sens critique !