Derrière les slogans de campagne, l’argumentaire des « brexiteers » reposait sur une promesse simple : le Royaume-Uni renforcera sa compétitivité internationale une fois libéré du carcan européen. C’est cette même rhétorique qui a sous-tendu la création de la stratégie « Global Britain », pour une Grande-Bretagne souveraine et plus que jamais connectée au monde.
Dans les faits, l’incertitude économique, politique et fiscale qui touche le pays depuis le referendum de 2016 a eu des effets délétères sur la compétitivité. Les concurrents européens, à l’instar de la France, s’en sont donné à cœur joie pour tenter de capter le flux d’étrangers fortunés en partance.
C’est dans ce contexte déjà fragile que le Trésor britannique a confirmé l’abolition, à compter d’avril 2025, du régime des non-domiciliés (non-doms). Déjà fortement amendé au cours des 10 dernières années, ce régime, reliquat de l’empire britannique, et sans équivalent dans les autres pays occidentaux, exonère les revenus mondiaux des étrangers résidant en Grande Bretagne. Selon les données gouvernementales, il y aurait plus de 75 000 bénéficiaires, pour la plupart étrangers. Une étude récente a montré que plus 20% des banquiers londoniens gagnant au moins £125 000 (env. €150 000) par an ont bénéficié du statut non-dom dans le passé. De fait, il est largement utilisé par les 1% les plus fortunés du pays.
Soutenue à la fois par les camps travailliste et conservateur, cette abolition inquiète conseillers financiers et milieux économiques, qui craignent un exode accéléré des fortunes étrangères vers des juridictions plus favorables. « Avec le Brexit, les conservateurs avaient promis de faire du Royaume-Uni un nouveau Singapour. À la place, ils ont fait de cet endroit la Biélorussie », témoigne anonymement (et avec un peu d’excès…) un milliardaire londonien qui va transférer sa résidence fiscale à Abou Dhabi.
Historiquement un hub financier dynamique, le Royaume-Uni a vu ses cartes rebattues, l’exode des fortunes étrangères allant de pair avec une baisse des investissements et une réduction de la demande pour les biens immobiliers haut de gamme. L’Italie, a contrario, propose un régime forfaitaire pour les nouveaux résidents fortunés, la France dispose d’un régime d’impatriation relativement attractif, la Suisse conserve un attrait incontesté, et bien sûr, les Emirats cherchent à profiter de cette évolution.
La compétition entre places internationales démontre en tout cas que la fiscalité demeure un instrument à part entière de l’attractivité économique. Sur le seul continent européen, la montée du souverainisme éloigne la perspective d’une harmonisation socio-fiscale. Mais le Royaume Uni ne sera probablement pas le redoutable concurrent annoncé lors du Brexit…