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Art : Le paradoxe de la confiance

Nouvelle ère ?

Si l’on en croit le Art Basel & UBS Global Art Market Report 2024, le marché de l’art, soutenu par des collectionneurs optimistes, semble entrer dans une nouvelle ère. Mais derrière cette confiance, des facteurs de perturbation émergent : des réglementations de plus en plus strictes, des enjeux écologiques pressants et des évolutions technologiques qui bouleversent les pratiques.

Optimisme

Les collectionneurs restent globalement confiants. D’après l’enquête, 90 % des High Net-Worth Individuals (HNWI), ces collectionneurs fortunés, prévoient de participer à des événements artistiques en 2025, et 43 % souhaitent y être plus présents. Le marché semble donc en bonne santé. Pourtant, un paradoxe se profile : 44 % des HNWI annoncent une baisse de leurs intentions d’achat par rapport à l’an dernier. Faut-il y voir un ralentissement ou simplement une phase de réflexion et de repositionnement stratégique ?

Il semble que les collectionneurs veulent rationaliser leurs acquisitions. Au lieu d’acheter à tout-va, ils se concentrent davantage sur des critères esthétiques et patrimoniaux. D’ailleurs, les intentions de vente augmentent fortement, atteignant 55 %. Ce n’est pas tant un recul qu’un retour à la sagesse : les collections seraient gérées de manière plus raisonnée.

Guerre des genres

La grande bataille de l’art contemporain se joue entre les formes classiques et l’art numérique. Ce dernier suscite un intérêt croissant, mais il peine à se faire une place. Moins de 25 % des collectionneurs se tournent vers ce secteur, un chiffre faible comparé à l’attrait durable pour les formes classiques comme la peinture et la sculpture. Les jeunes générations restent fidèles aux supports traditionnels, même si elles montrent un intérêt pour les nouvelles pratiques. L’art numérique peine donc à s’imposer, mais les prochaines années pourraient tout changer. Avec la blockchain et les NFT, l’art numérique cherchera à trouver sa place, même s’il reste encore largement en quête de légitimité.

« Glocal » et durable

Le marché de l’art se trouve par ailleurs sous pression, à la fois par des contraintes réglementaires et des préoccupations environnementales. Les droits d’importation élevés et les exigences de transparence financière freinent la circulation des œuvres à l’échelle mondiale. Ce phénomène pourrait conduire à un reshoring du marché, où les grands hubs artistiques comme New York et Londres devront évoluer. L’art pourrait ainsi devenir plus local, et de plus en plus difficile à déplacer.

Parallèlement, les préoccupations écologiques montent en flèche. 80 % des collectionneurs se disent préoccupés par l’empreinte carbone du marché de l’art. Les expositions virtuelles, jugées plus écologiques, peinent malgré tout à remplacer les événements physiques, qui restent essentiels pour leur dimension sociale et sensorielle. Les solutions logistiques alternatives commencent à émerger, mais elles sont encore loin d’être parfaites. Le marché de l’art tente de « verdir » ses pratiques tout en restant fidèle à son essence.

Survivre

Malgré ces défis, le monde de l’art semble résilient. Les collectionneurs sont confiants : 90 % d’entre eux croient en des perspectives positives à court terme. Les foires d’art continuent d’être des lieux incontournables de découverte, propices aux échanges entre artistes et collectionneurs. De plus, la technologie, notamment la blockchain, pourrait offrir des solutions de transparence et d’efficacité pour les transactions, renforçant la confiance des acteurs.

Les marchés régionaux, eux, offrent de nouvelles perspectives, permettant une plus grande visibilité aux artistes locaux. Cela pourrait également favoriser une plus grande diversité dans le paysage artistique.

Cependant, plusieurs questions demeurent : l’art numérique parviendra-t-il à s’imposer sans perturber l’équilibre entre tradition et innovation ? Les nouvelles régulations risquent-elles de créer une fracture irréversible entre les acteurs traditionnels et numériques ? Dans un monde où tout se globalise et se fragmente à la fois, comment l’art va-t-il se déployer à travers des frontières de plus en plus complexes ?

En fin de compte, ce marché, comme beaucoup d’autres, est à un tournant. L’enjeu sera pour lui de parvenir à naviguer avec succès dans ces eaux agitées, tout en répondant aux enjeux environnementaux et réglementaires. Le futur est incertain, il faudra se réinventer pour survivre.

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